EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Année après année, la souveraineté alimentaire de la France décline. Comme le démontrent les données fournies par FranceAgriMer et les organismes nationaux représentant nos filières, ce déclin s’observe dans de nombreux secteurs‑clés :
– entre 2000 et 2023, les importations françaises de viandes et préparations de volailles ont augmenté de 470 %, passant de 150 000 à 859 000 tonnes, la volaille importée représentant aujourd’hui 60 % de la consommation hors‑domicile ;
– la collecte de lait a quant à elle diminué sur le début de l’année 2025 de près de 2,5 % par rapport à l’année précédente alors que la consommation de produits laitiers reste stable ;
– la France importe 60 % de ses fruits et 40 % de ses légumes, avec de très fortes augmentations d’importations de légumes depuis nos voisins européens en 2025 : +21 % sur les volumes de courgettes importés d’Espagne, +143 % sur les oignons et échalotes de Belgique.
Ces tendances structurelles fragilisent non seulement notre indépendance alimentaire, mais également les filières agricoles qui structurent nos territoires.
Pourtant, les Français demeurent très largement conscients de l’enjeu que constitue la souveraineté alimentaire. Lorsqu’ils en ont les moyens, ils se montrent prêts à privilégier les productions françaises. Ainsi, l’édition 2024 du baromètre de confiance des fruits et légumes frais fait apparaître que l’origine géographique est le premier critère d’achat des Français (66 %), devant la saisonnalité du produit (64 %) et le prix (41 %) ([4]).
Ils expriment avec constance leur volonté d’une meilleure transparence sur l’origine des produits alimentaires, comme l’illustre une étude Harris Interactive de 2024 : 60 % des personnes interrogées estiment que le consommateur n’est pas suffisamment informé sur la qualité nutritionnelle et l’origine des produits qu’il achète, tandis que 85 % déclarent qu’il est important de connaître cette origine[5].
Si des progrès ont été réalisés sur la traçabilité des produits bruts – notamment les fruits et légumes –, l’information reste largement insuffisante pour les produits transformés. La loi n° 2021‑1357 du 18 octobre 2021 dite « Egalim 2 », a marqué une avancée notable. Toutefois, deux dispositions essentielles, figurant aux articles 12 et 13, sont restées lettre morte : les décrets d’application n’ont jamais été pris, ce qui rend ces mesures inopérantes à ce jour. Pire encore, certaines obligations légales demeurent de facto inappliquées en l’absence de sanctions prévues en cas d’infraction.
La présente proposition de loi entend achever ce chantier législatif laissé en suspens. Elle vise à garantir enfin aux consommateurs une information exhaustive, claire et sincère sur l’origine des produits alimentaires, qu’ils soient bruts ou transformés. Une telle transparence est indispensable pour restaurer la confiance des Français et favoriser une consommation locale, en cohérence avec notre objectif de souveraineté alimentaire.
Les données de l’UFC‑Que Choisir sont à cet égard édifiantes. Selon une étude publiée en mars 2024, 69 % des ingrédients des produits transformés vendus en France sont d’origine géographique inconnue. Ce taux atteint même 84 % pour les légumes et céréales et 64 % pour la viande de volaille[6]. Cette opacité entrave la capacité des consommateurs à faire des choix éclairés et affaiblit la position concurrentielle des productions nationales.
L’article 1er de cette proposition de loi modifie l’article L. 412‑4 du code de la consommation. Il affirme clairement que l’origine de tous les produits alimentaires doit être clairement indiquée par étiquetage. Il s’agit de rétablir la portée générale de cette obligation, telle qu’elle découle du premier alinéa de l’article, en supprimant la disposition qui la conditionnait à une liste fixée par décret, jamais publiée depuis 2016.
Par ailleurs, le même article introduit une nouvelle obligation d’étiquetage sur les ingrédients significatifs des produits transformés. En effet, la législation actuelle ne couvre que les « ingrédients primaires » au sens du règlement européen de 2011, dont la définition est plus restreinte. De plus, l’indication du pays d’origine n’est pas systématique, la mention selon laquelle le pays d’origine de l’ingrédient primaire est différent du pays de fabrication étant considérée comme suffisante. Le présent texte exige que l’origine soit clairement indiquée dès lors qu’un ingrédient joue un rôle essentiel dans la composition ou la perception du produit final.
L’article 2 vient combler une carence de la loi en introduisant une sanction dissuasive en cas de manquement à ces obligations. Il propose une peine d’un an d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende, soit la moitié de la peine prévue pour les pratiques commerciales trompeuses.
L’article 3 complète le dispositif prévu à l’article L. 121‑4 du code de la consommation, proscrivant l’usage du drapeau tricolore ou de tout signe évoquant une origine française sur l’emballage d’un produit transformé si son ingrédient primaire n’est pas français.
Toutefois, une exception est prévue pour les produits dont les matières premières ne peuvent pas être produites en France (comme le café ou le cacao). Dans ce cas de figure, il est proposé de limiter l’usage de symboles suggérant une origine française aux seuls produits dont les étapes essentielles de la transformation ont été réalisées en France.
Cette proposition de loi poursuit ainsi un objectif simple mais essentiel : renforcer la transparence sur l’origine des produits et ainsi donner aux Français les moyens de faire des choix éclairés, en leur permettant de privilégier, s’ils le souhaitent, la production nationale. Elle constitue un levier puissant pour faire progresser notre souveraineté alimentaire et répondre à une attente exprimée par les Français à de multiples reprises.
Elle s’inscrit ainsi pleinement dans la dynamique de promotion du localisme exprimée dans le programme présidentiel de Mme Marine Le Pen en 2022 et dans la continuité du combat parlementaire mené depuis trois ans par les députés du groupe Rassemblement national – notamment lors des débats sur la loi d’orientation agricole et la loi pour lever les entraves à l’exercice du métier d’agriculteur – pour faire rayonner le patrimoine agricole exceptionnel de notre pays et rendre à la France son rang d’acteur de premier plan du marché agro‑alimentaire mondial.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
L’article L. 412‑4 du code de la consommation est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Le consommateur est informé, au moyen de l’étiquetage, du pays d’origine de tout produit agricole ou alimentaire et de tout produit de la mer, à l’état brut ou transformé. Il est également informé, par le même moyen, de tous les pays d’origine des miels composant un mélange de miels en provenance de plus d’un État membre de l’Union européenne ou d’un pays tiers. » ;
2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Le pays ou la zone géographique d’origine de l’ingrédient primaire des produits transformés est également indiqué, ainsi que celle de tout ingrédient représentant 10 % ou plus de la composition du produit. » ;
3° Le troisième et l’avant‑dernier alinéas sont supprimés ;
4° Le dernier alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, les mots : « La liste des produits concernés et » sont supprimés ;
b) À la fin, les mots : « après que la Commission européenne a déclaré compatible avec le droit de l’Union européenne l’obligation prévue au présent article » sont supprimés.
Article 2
Après l’article L. 451‑13 du code de la consommation, il est inséré un article L. 451‑13‑1 ainsi rédigé :
« Art. L. 451‑13‑1. – Le non‑respect des prescriptions prévues à l’article L. 412‑4 est puni d’une peine d’emprisonnement d’un an et d’une amende de 150 000 euros. »
Article 3
Le vingt‑neuvième alinéa de l’article L. 121‑4 du code de la consommation est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les symboles mentionnés au même 24° peuvent dans ce cas être utilisés dès lors que les étapes essentielles de la transformation du produit ont été réalisées sur le territoire français. »