Après plusieurs heures de débats et trois examens devant l’Assemblée nationale, le projet de loi visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires et à améliorer l’accompagnement des victimes a été adopté.
Si l’intention portée par ce texte était bonne, son article 4 vient désormais réprimer la provocation à l’abandon ou l’abstention de soins ou à l’adoption de pratiques dont il est manifeste qu’elles exposent la victime à un risque grave ou immédiat pour sa santé.
La rédaction de cet article était décriée par le Conseil d’État, qui avait alerté sur un grave risque d’inconstitutionnalité en indiquant que « ni la nécessité, ni la proportionnalité de des incriminations créées par le projet de loi ne sont avérées ».
Cette disposition controversée avait, par ailleur,s été supprimée en première lecture au Sénat avant d’être ré-introduite par la commission des Lois de l’Assemblée nationale, supprimée à nouveau en séance publique puis réintroduite par une seconde délibération demandée par le groupe Renaissance. Son parcours législatif prouve donc déjà, en lui-même, l’absence de consensus politique.
Avec cet article 4, c’est l’ensemble du débat médical qui risque d’être mis sous cloche et l’exclusion des lanceurs d’alerte de son champ d’application n’y changera rien : un lanceur d’alerte ne peut être reconnu comme tel que plusieurs années après ses révélations, posant un grave problème de temporalité et rendant possible des condamnations infondées.
Dans ces conditions, l’affaire du Mediator aurait-elle pu éclater si Irène Frachon avait été menacée d’un procès pénal ?
Pire : les modifications apportées au fil de l’examen du texte ont rendu cet article illisible et juridiquement contestable. Il porte toujours le vice originel déjà dénoncé par le Conseil d’État d’une atteinte grave aux libertés fondamentales des Français, notamment la liberté d’expression et la liberté de conscience. La peine pénale qu’il institue est, enfin, totalement disproportionnée à l’objectif poursuivi.
Pour toutes ces raisons, le groupe Rassemblement National saisit le Conseil constitutionnel de la loi visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires afin que ses dispositions les plus décriées soient censurées.